vantard et bruyant. Mais ces défauts mêmes, et tant de souvenirs des jours heureux, le rendaient agréable ; elle l’embrassa avec des larmes[1] et l’installa, avec l’abbé de Fontanges[2], dans son conseil intime[3].
Il y prodigua, neuf mois durant, les avis furieux. En correspondance suivie avec Bouillé, il le pressait de marcher avec les régiments fidèles sur Paris, parlait sang et massacre ; lui-même, il passera « son couteau de chasse à travers le corps des officiers nationaux qui s’opposeraient au départ du Roi[4] ». Et, comme Louis XVI ne profite pas, pour fuir, du séjour qu’il fait à Saint-Cloud, « où il y avait toute facilité[5] », Esterhazy proclame son égal mépris du roi et du peuple : « Le Roi livre la noblesse et le clergé aux scélérats ; il n’a même plus assez de caractère pour abdiquer, comme la Reine l’y engage[6]. »
Il parlait plus qu’il n’agissait ; mais tant de bravades et de propos sans mesure excitaient contre lui des haines violentes. Déjà, pendant son gouvernement du Hainaut, il avait été dénoncé, par deux fois, à l’Assemblée[7] : pour avoir fait rebrousser des farines sur Bruxelles, « dans le dessein de faire mourir le peu-
- ↑ Mémoires, IV, 37.
- ↑ François de Fontanges, aumônier de la Reine ; il était, depuis 1788, archevêque de Toulouse.
- ↑ Correspondance du comte de Vaudreuil avec le comte d’Artois, I, 309, lettre du 26 septembre 1790 : « Ceux qui ont à présent la principale confiance de la Reine sont d’Esterhazy et l’abbé de Fontanges. »
- ↑ Mémoires, IV, 48.
- ↑ Michelet, Révolution, I, 194. — Esterhazy raconte, dans ses Mémoires, comment, dans une partie de chasse au Vésinet, Louis XVI laissa échapper une occasion de gagner l’armée de Bouillé (IV, 48).
- ↑ Mémoires, IV, 42.
- ↑ Lettre d’Esterhazy au marquis de Goury, du 27 août 1789 : « Sur des faits tous également faux. »