Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1903, Tome 2.djvu/279

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
269
LE PETIT BLEU


de tir, des feuilles du cours de l’École de tir au camp de Châlons[1].

Cuers en dirait davantage si le service voulait organiser une entrevue avec lui.

Picquart fut saisi de la ressemblance entre le signalement de l’officier ainsi dénoncé et celui qu’il surveillait : même âge, même grade. Il retrouva dans les propos de Cuers l’écho des soupçons et du mécontentement que révélait le petit bleu. Ces mêmes cours de Châlons, il sait, par Curé, qu’Esterhazy les a empruntés à son colonel et qu’il les a fait copier. Le hasard n’amène pas de telles rencontres[2].

Picquart ne confia pas à Foucault de quel jet de lumière il venait d’être ébloui[3]. Il lui dit seulement que l’affaire lui paraissait sérieuse et réclama son concours[4] pour organiser, à Bâle, une entrevue entre Cuers et un officier du service.

Foucault repartit pour Berlin.

Avançant avec méthode, Picquart décida de faire, sans tarder, un pas de plus. Il donna mission à Desvernine de lui procurer de l’écriture d’Esterhazy. L’agent se rendit compte, pour la première fois, du but de ses recherches[5].

Il prescrivit, en même temps, de faire saisir à la poste les lettres adressées à Esterhazy[6].

Il n’entrevoyait pas encore qu’Esterhazy pût être l’auteur du crime pour lequel Dreyfus avait été con-

  1. Cass., II, 87 ; Rennes, I, 423, Picquart.
  2. Rennes, I, 423, Picquart.
  3. « Le colonel Picquart ne parut pas vouloir me dire ce qu’il en pensait. » (Foucault au ministre.)
  4. Instr. Tavernier, 23 sept. 1898, Picquart.
  5. Cass., I, 731 ; Rennes, II, 252, Desvernine.
  6. Note du colonel Picquart pour le ministre seul, 26 novembre 1896. (Instr. Tavernier.)