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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


coupable ? Quoi ! la France a refusé de croire Munster et Hohenlohe, et l’empereur allemand lui-même, quand ils ont déclaré que Schwarzkoppen n’a pas eu de rapports avec Dreyfus, et elle ajouterait foi à la confidence de Cuers !

Écartant ces hypothèses, Picquart se contenta de penser qu’Henry et Lauth avaient manqué d’adresse.

Deux mois après, Foucault, venu en congé à Paris, lui demanda de quels singuliers délégués il avait fait choix pour l’entrevue de Bâle. Cuers était retourné à l’ambassade ; il avait dit à l’attaché français, d’un ton de sincérité persuasif, que les envoyés du service l’avaient traité de façon singulière. L’un d’eux, notamment, « gros, rouge, qui se disait policier, mais qu’il avait reconnu pour un officier, l’avait constamment bousculé pour l’empêcher de parler[1] », — non pas pour le faire parler, comme Lauth et Henry l’avaient raconté[2].

Picquart dit à Foucault que ses officiers avaient été inhabiles, et il le pria d’organiser une seconde entrevue avec Cuers.

  1. Cass., I, 152 ; Rennes, I, 427, Picquart.
  2. Enq. Pellieux, Henry : « Je lui exprimai alors très durement mon étonnement et lui fis comprendre qu’il était envoyé par le grand État-Major allemand ; c’est, sans doute, ce que cet agent appelle avoir été bousculé. » — Cass., I, 420, Lauth : « Cuers s’est plaint à Foucault qu’on l’ait torturé pour l’empêcher de parler ; c’est absolument le contraire qui a eu lieu. » À Rennes : « Je me demande comment, en bousculant quelqu’un, on peut l’empêcher de parler. » (I, 625.) À l’instruction Tavernier : « C’est peut-être le souvenir des nombreuses libations qu’il a faites à Bâle qui agissait encore sur son cerveau. » (12 octobre 1898.)