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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


as de bonnes raisons de croire que cette atroce situation ne sera plus de longue durée. Ah ! je souhaite de toute mon âme que cette fois ton espoir ne soit pas trompé, car c’est vraiment trop souffrir. » Elle lui écrivit encore, le 25 juin : « Je suis forte, ma volonté est inébranlable, j’arriverai à te faire rendre ton honneur et je te supplie d’avoir avec moi cet espoir absolu dans l’avenir. »

Picquart lisait ces lettres, d’autres encore ; il en fit copier, photographier quelques-unes[1], les soumit à Boisdeffre qui dit « que cela pouvait passer[2] ». À cette époque, il n’avait découvert encore que le crime d’Esterhazy ; il fit redoubler la surveillance. Quand il eut acquis la certitude de l’innocence de Dreyfus, il s’inquiéta des préparatifs qui lui étaient dénoncés. Ces gens ne peuvent avoir aucune preuve de l’erreur judiciaire : quel scandale vont-ils faire éclater ? Il n’avait nul moyen ni, surtout, le droit de les prévenir que tout ce qu’ils tenteraient, en ce moment, serait une faute lourde, se retournerait contre le malheureux, entraverait ses efforts.

II

Le jour même[3] où Picquart alla rendre compte à Gonse, le Daily Chronicle (de Londres) annonça l’évasion de Dreyfus d’après le South Wales Argus, journal de New-Port, dans le Monmouthshire, qui tenait la nouvelle du capitaine Hunter, l’Argus racontait que ce

  1. Instr. Fabre, 99 ; Cass., I, 162 ; Rennes, I, 435, Picquart.
  2. Cass., I, 162, Picquart.
  3. 3 septembre 1896.