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HENRY


Henry paraît avoir montré à sa femme les deux faux : et la malheureuse trouva que les deux écritures étaient bien pareilles. Il lui aurait dit alors qu’il s’était servi « d’éléments verbaux, reçus quelques jours auparavant, pour ajouter une preuve nouvelle, convaincante et matérielle au dossier, dans l’intérêt de la patrie[1] ».

Un peu plus tard, encouragé par le succès, Henry procéda à une seconde opération à l’aide de la lettre de Schwarzkoppen qu’il avait également empruntée au dossier secret. Il n’était pas plus difficile pour Lemercier-Picard d’imiter l’écriture de l’Allemand que celle de l’Italien. Il fabriqua donc la réponse de Schwarzkoppen à la lettre inquiète de Panizzardi. Dans un premier billet, Schwarzkoppen rassurait rapidement son collègue. Dans un second, plus développé,

    de cette pièce. » Sur interrogation, il renouvelle sa déclaration (II, 220). — Rennes, II, 216, Gonse : « Je l’ai vue pour la première fois en 1896. » Il ajoute plus loin : « C’était une pièce qui était considérée comme insignifiante, et elle n’a été mise au dossier que comme pièce de comparaison en 1896. » — Henry dit de même : « C’était une pièce sans importance. » (Revision, procès-verbal, 98.) — La pièce de rebut, qui servit à faire la fausse pièce de comparaison, la pièce que vit Picquart était, en effet, insignifiante. — Boisdeffre n’a pas été interrogé sur ce point. — Lauth et Gribelin, d’autre part, affirment qu’ils ont vu la pièce bien avant le procès de 1894 (Rennes, II, 219, 217), Gribelin précise que, Roget lui ayant montré la pièce en 1898. il la reconnut à ces mots : « dont un seul Juif », et que Sandherr lui-même la lui avait fait voir ; Sandherr ayant quitté le service le 16 juin 1895, « la pièce a donc été apportée bien avant 1895 », Mais, avant la fin de 1895, il n’y avait pas de Juif à l’ambassade d’Italie ! — Cuignet (Cass., I, 339) et Roget (Rennes, II, 218) répètent, d’après Lauth, que « la pièce est arrivée en 1894 ».

  1. Rennes, I, 264, Veuve Henry. — Le président pose ensuite cette question : « Ces renseignements verbaux, votre mari vous en avait-il parlé auparavant ? Qui lui avait donné ces renseignements ? » Mme Henry ne répond pas. — Le 31 août 1898, quelques heures avant sa mort, Henry écrivit à sa femme : « Tu sais dans l’intérêt de qui j’ai agi. » (Cass., I, 123.) La réponse se trouve peut-être dans ce passage du rapport de Wattines, le gendre de Billot, de mai 1898 : « À ce moment (septembre 1896), le même personnage diplomatique qui a été plusieurs fois un guide sûr dans cette affaire, révèle encore spontanément que le colonel Panizzardi est très préoccupé. » Il s’agit de Val-Carlos.


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