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APPENDICE

C’est ce que confirme, de nouveau, Lauth : « Avant de remettre les paquets, Henry faisait toujours un premier triage. »

Il est vrai que Lauth ajoute : « Henry enlevait tous les fragments portant de l’écriture française. » (46.) Apparemment, s’il en avait été ainsi, Picquart s’en serait aperçu, et il aurait rappelé Henry au respect de la consigne. Cette consigne, Lauth lui-même, au procès Zola (I, 341), l’avait résumée en ces termes ; « Le colonel Picquart, comme c’était son droit, a demandé qu’après avoir pris livraison, Henry lui fit passer les paquets. »

Henry répète, de même, au juge Fabre « qu’il était seul à recevoir ces fragments de l’agent et qu’il n’a vu, à aucun moment, les fragments du petit bleu dans les papiers » (47).

Devant la Cour de cassation, Gonse et Lauth se taisent sur ces pratiques d’Henry ; mais ils les relatent de nouveau à l’instruction du commandant Tavernier (1er  et 3 octobre 1898). Lauth, le 5 novembre, s’embrouille même dans de nouvelles contradictions : « J’ignore la teneur exacte de l’ordre que le colonel Picquart avait donné à Henry pour faire passer par son intermédiaire les paquets provenant de l’agent et qui m’étaient destinés. » — Au procès Zola (I, 341), il avait relaté très exactement la consigne de Picquart et n’avait pas encore imaginé de faire du chef de service un intermédiaire entre ses subordonnés. — Picquart, selon Lauth, « aurait essayé lui-même de reconstituer les papiers, puis y aurait renoncé après deux ou trois expériences peut-être ». — Quoi qu’il en soit, « certainement, dès l’origine, Henry a dû continuer à trier les papiers », et « Picquart, certainement, a dû s’en apercevoir à la longue ».

En conséquence, Tavernier écrit dans son rapport :

Picquart prescrivit au commandant Henry de ne plus remettre à Lauth les débris de manuscrits et ordonna que ces débris passeraient désormais par ses mains avant d’arriver à Lauth.