Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1903, Tome 2.djvu/710

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
700
HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


ils ne veulent pas marcher ; eh bien ! je leur forcerai la main. »

Je n’ai pu faire, dit-il, le 5 août, aucune observation sur l’inanité des charges que Picquart apportait contre Esterhazy, puisqu’il était alors dans la période active des recherches. Je ne crois donc pas que ce puisse être ce jour-là qu’on a entendu Picquart pousser l’exclamation en question. Il devait d’ailleurs être assez tard ; si mes souvenirs sont exacts, je crois avoir voyagé par un train partant de Vichy vers midi et arrivant à Paris vers six heures et demie du soir, ce qui m’aurait mis chez moi vers sept heures[1].

Or, Lauth, après avoir essayé de fixer l’entretien de Bâle au 2 ou au 3 août[2], convient qu’il quitta Paris le 5 août[3], par le train de nuit[4], à 8 h. 20[5] et que l’entrevue avec Cuers eut lieu le 6[6].

Devant la Cour de cassation, il s’enfonce plus encore : il place[7] le prétendu propos de Picquart au lendemain de l’arrivée de Boisdeffre à Paris, donc au 6, — et le 6, Lauth était à Bâle, — ou, peut-être, au surlendemain, en précisant que Picquart se lavait les mains ! — et le 7, Boisdeffre était à sa campagne, dans l’Orne, ayant quitté de nouveau Paris le 6[8].

Ainsi convaincu d’imposture par la chronologie, Lauth, à Rennes, essaye de tricher sur les heures ou les minutes, mais sans plus de succès. Il dépose[9] que le 5, avant de partir pour Bâle, « il resta tard au bureau, jusqu’à 6 heures et demie ou 7 heures », et que Picquart y rentra après avoir eu son entrevue avec Boisdeffre. Or, on a vu que Boisdeffre rentra chez lui vers 7 heures[10] et

  1. Instr. Fabre, 46.
  2. Ibid., 173.
  3. Rennes, I, 621, 630.
  4. Instr. Fabre, 173.
  5. Rennes, I, 630.
  6. Ibid.
  7. Cass., I, 422.
  8. Instr. Fabre, 59, Boisdeffre.
  9. Rennes, I, 630.
  10. Instr. Fabre, 46.