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L’ENQUÊTE DE PELLIEUX


nimité par sept de ses pairs, sur le témoignage de vingt-sept officiers témoins au procès. » Il fait un bloc des témoins à charge, à décharge.) « L’affaire Dreyfus a été régulièrement et justement jugée. Pour moi, en mon âme et conscience, comme soldat, comme chef de l’armée, je considère le jugement comme bien rendu et Dreyfus comme coupable. » Toute la Chambre applaudit, sauf l’extrême gauche.

Pour Esterhazy, la Chambre comprendra que Billot « ne cherche pas à influencer la justice ». (Il vient de déclarer que le bordereau est de Dreyfus ; c’est l’ordre d’acquittement d’Esterhazy.) « Quant aux odieuses accusations, qui, depuis trop longtemps, visent les chefs de l’armée, et notamment son éminent chef d’État-Major général », il regrette, « au fond de son cœur, d’être désarmé par la loi et de ne pouvoir les poursuivre ». « Doyen et chef de l’armée française », il rend hommage, avec joie, à son éminent collaborateur : « Depuis dix-huit mois, je travaille silencieusement avec lui à mettre la France à hauteur de toutes les éventualités. »

Et la Chambre l’acclame, comme elle a acclamé Mercier, Lebœuf, tous les ministres de la Guerre qui lui ont menti.

Inutile lâcheté que celle de Méline, de Billot, comme toutes les lâchetés. Voici Millerand à la tribune et, ramassé sur lui-même, martelant ses paroles, dur, acerbe, politique encore étranger à tout ce qui n’est pas la politique de parti, il écrase le Gouvernement sous l’étonnant reproche d’être l’ami et le complice des promoteurs de la Revision : « Croyez-vous que, si une ordonnance de non-lieu est rendue, vos amis, ceux qui mènent cette campagne… » Méline, Barthou, Billot se dressent à leurs bancs : « Vous osez dire que c’est nous qui menons cette campagne ! c’est odieux ! » Millerand : « J’ignorais que