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L’ENQUÊTE DE PELLIEUX

XVII

Scheurer demanda à interpeller le Président du Conseil et le ministre de la Guerre au sujet des déclarations qu’ils avaient faites à la Chambre[1].

Ce qui, plus que la folie ou la couardise des députés, l’avait indigné, c’était le mensonge de Billot affirmant : « Dreyfus a été justement et régulièrement condamné. »

Il ne songeait pas à rendre le Sénat juge entre Dreyfus et Esterhazy ; mais il eût voulu démontrer que la possibilité d’une erreur judiciaire n’avait pas toujours été écartée par L’État-Major.

Les lettres de Gonse et de Picquart ont décidé la conviction de Scheurer. Lues, commentées par lui, elles seront d’un grand effet. Gonse, Henry en ont si grand peur que, d’avance, ils les font discréditer, dénaturer par les journaux. Encore quelque temps de ce travail, et, défraîchies, fanées, quand elles paraîtront dans leur véritable texte, elles donneront l’impression d’une chose déjà vue, d’une vieillerie.

Mais Leblois, au nom de Picquart, défendit à Scheurer de les porter au Sénat[2].

Picquart n’avait revu Leblois qu’une seule fois, le jour où Pellieux l’y avait autorisé[3]. Et, sans doute, il n’était pas homme à récriminer pendant le combat ; pourtant, il le trouvait mal engagé, prématuré ; surtout, dans cette aventure, il tenait à éviter tout ce qui pour-

  1. Lettre du 6 décembre 1897 au président du Sénat, Loubet.
  2. Le 6. — Procès Zola, II, 353, Labori : « Picquart s’y opposait. » — À l’audience du 12 février 1898, Picquart dit lui-même qu’il s’y était opposé « de la façon la plus absolue ».
  3. Voir p. 122.