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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


humaine, l’imbécile amour-propre : « Je ne veux pas m’être trompé. » Quelques-uns commencèrent à confesser leur erreur. Ils s’aperçurent que cela n’était point si pénible.

Dans le monde des politiques, ce qui retardait surtout l’aveu, c’était la proximité des élections : « Pourquoi cette affaire a-t-elle éclaté si tôt ? »

Dès qu’ils en trouvaient l’occasion, les défenseurs de la Revision s’adressaient aux tribunaux. Aux époques de tyrannie, quand les assemblées tremblent devant le tyran « Un seul » ou devant le tyran « Tous », c’est au prétoire qu’il faut porter la bataille.

Trois procès (jalons vers la vérité pour le lendemain de la défaite) furent ainsi provoqués ou engagés :

Par Picquart contre les auteurs des télégrammes qu’il avait reçus en Tunisie. — Billot, à la demande de Trarieux, avait ouvert une enquête sur l’origine de ces faux ; nécessairement, au bout de peu de jours, il déclara que les soupçons (sur Esterhazy et ses amis) n’étaient pas fondés[1] ; Picquart adressa au procureur de la République une plainte motivée[2].

Contre Mathieu Dreyfus, au sujet d’une prétendue

  1. Procès Zola I, 189, 190, Trarieux.
  2. Du 3 janvier 1898, en faux et usage de faux. Il dénonçait Souffrain comme l’auteur du télégramme Speranza. — Pellieux dit « qu’il mit Picquart en présence de sa propre certitude, qu’il avait acquise par une enquête à la préfecture de police », que Souffrain, malgré ses dénégations, était l’auteur de la dépêche. (Procès Zola, I, 265.) « Une jeune fille employée au bureau de poste avait reconnu Souffrain dans une douzaine de photographies qu’on lui avait présentées. » (Cass., I, 103, Roget.) D’autre part, Pellieux contesta que Souffrain pût être l’agent d’Esterhazy, ce qui, au contraire, confirma Picquart dans ses soupçons. — En ce qui concerne le télégramme Blanche, Picquart porta plainte contre « inconnu », mais il se réservait de mettre en cause Du Paty. — Bertulus fut « requis », le 28 janvier, d’avoir à instruire en faux, usage de faux et complicité contre X. (Cass., I, 220.)