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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


homme était de détromper Cavaignac ou de le démentir, de faire connaître la vérité à la Chambre.

Il eut peur et se tut.

Et de même, Barthou, Poincaré, Hanotaux.

La réponse de Méline fut très courte. Il n’eut garde d’infirmer la légende des aveux qui le pouvait servir. Mais il déclara que la procédure, recommandée par Cavaignac, pour arrêter la campagne en faveur de la Revision, équivalait à ouvrir le procès de revision à la tribune, À cela, il se refusait formellement et se refuserait toujours. Le Gouvernement n’a qu’à appliquer la loi et à se remettre de cette affaire, qui n’est que judiciaire, à la justice.

Montesquieu n’eût pas parlé autrement par respect pour le principe tutélaire, qui est toute la liberté, de la séparation des pouvoirs ; ni Machiavel, pour couvrir un crime du manteau du droit.

C’était l’évidence que, du jour où les faits de la cause seraient portés par le Gouvernement à la tribune, où la Chambre remplacerait le prétoire, la Revision était faite. C’est ainsi qu’elle se fera, dans quelques mois, par Cavaignac.

Ni Méline, qui n’avait pas voulu regarder au dossier, ni Billot, qui en connaissait l’effroyable vide, tout le mensonge, ne tombèrent au piège. En décidant que le Gouvernement n’accepterait de débat sur aucun fait précis de l’Affaire, ni sur les expertises, ni sur les aveux, ni sur les pièces secrètes, ils arrêtèrent net la Revision, la Justice, et cela par la Constitution, par la Loi des Lois.

L’ordre du jour de Cavaignac n’eut pas 200 voix sur 509 votants[1]. Mais, sur l’ordre du jour de confiance,

  1. 183 voix contre 299.