rière elle pour donner la chasse aux juifs. Les boutiquiers chrétiens arborèrent des pancartes indicatrices : « Maison catholique. Pas de juifs dans la maison. — Nous sommes tous chrétiens et catholiques ! — Vive la France ! À bas les juifs[1] ! »
Les émeutiers ainsi renseignés n’assaillirent que les magasins de la concurrence. « Qui avait donné ce mot d’ordre ? Ah ! personne, si ce n’est le Christ lui-même, le Christ qui aime les Francs, et auquel il faudra bien revenir, puisque lui seul est le sauveur. La protection fut claire, palpable, évidente. Pas une maison française ou même étrangère, ni arabe, n’a souffert le moindre dégât, tandis que, à côté, au milieu de la sérénité parfaite des éléments français, on saccageait tout chez les juifs, et cela, très souvent, entre deux magasins non-juifs. Il n’y a pas eu une seule méprise[2]. »
Le général Varloud, qui commandait à Alger, était un vieux républicain. Le cœur lui levait quand ces misérables, se jetant à la tête de son cheval, criaient : « Vive l’armée[3] ! »
Le préfet (Granet), le gouverneur (Lépine), avertirent le maire (Guillemin) qu’ils lui retireraient la police s’il ne faisait pas respecter l’ordre. Le maire crut s’en tirer par des proclamations : « Vous avez été indignés des agissements infâmes de ceux qui essayent d’atteindre cette chose sacrée : l’honneur de l’armée française. L’émotion soudaine de la mère-patrie a vibré du premier coup dans vos cœurs. Mais ne faites pas dégénérer en désordres de la rue et en attaques contre les propriétés