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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


rement au 4e tirailleurs[1] », ce qui le rendit justiciable du gouvernement de Paris. Ils purent ainsi le déférer à un conseil d’enquête qui était sûr, puisqu’il était présidé par le général de Saint-Germain, ami personnel de Mercier, et qu’il comprenait, avec le général Dumont et le commandant Audry, le colonel Boucher, ami intime de Boisdeffre qui le tutoyait[2], et ce capitaine Anthoine qui venait de faire, au sujet des prétendus aveux de Dreyfus, une déposition suspecte[3].

Cette fausse qualification de l’inculpé, l’incompétence qui en résultait du conseil d’enquête, rendaient nulle toute la procédure. Mais ce lointain lendemain, où Picquart pourra se pourvoir devant le Conseil d’État, importait peu à Boisdeffre. L’essentiel, c’était de frapper, d’intimider par un tel exemple quiconque, sous l’uniforme, aura souci de la vérité.

Le rapport du général Dumont[4] reprit toutes les vieilles accusations d’Henry. Picquart était accusé d’avoir communiqué à Leblois le dossier secret de Dreyfus et deux dossiers confidentiels, de lui avoir remis quatorze lettres de Gonse et d’avoir fait à Lauth des proposions fallacieuses.

Comme il existait deux dossiers relatifs aux pigeons-voyageurs, Gribelin et Henry remirent au conseil, au lieu de l’administratif que Picquart avait communiqué à Leblois, le secret qu’il ne lui avait jamais montré[5].

  1. Cass., II, 129 : rapport de Boucher à Billot : lettre au gouverneur de Paris. — Cass., I, 207. Picquart : « Cette qualité n’existe pas, à ma connaissance : j’étais lieutenant-colonel au 4e tirailleurs et tout lien entre l’État-Major de l’armée et moi était également rompu. »
  2. Cass., I, 208, Picquart.
  3. Voir p. 291.
  4. Du 30 janvier 1898. (Cass., II, 149 et suiv.)
  5. Cass., I, 208, Picquart.