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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


silence, dans son propre journal, sur l’incident[1].

Le coiffeur Chauvin, député socialiste, assistait à la réunion. Il en fit le récit à Jaurès. Les journaux revisionnistes signalèrent joyeusement, mais sans y insister, l’énorme sottise, bien digne de l’imbécile qui avait produit à la tribune les faux du mulâtre Norton.

Grande faute de n’avoir fait que rire de l’imprudent bavardage de Millevoye. Il eût fallu pousser l’affaire à fond.

Le gouvernement prussien fut plus avisé. La Gazette de l’Allemagne du Nord démentit officiellement[2] que l’Empereur eût jamais écrit en ces termes au comte de Munster.

On s’étonna qu’un grand gouvernement s’abaissât à relever de telles inepties. On ne remarqua pas la coïncidence entre les dernières révélations d’Henry et les déclarations de Millevoye.

Henry ne reparut plus à la barre.

XVIII

Il n’y eut jamais de plus ingénieux metteur en scène que l’huissier-audiencier de la cour d’assises. Delegorgue l’ayant invité, après la déposition d’Henry, à faire venir le témoin suivant, il introduisit Demange. Et, sur l’heure, la première partie du roman d’Henry s’effondra, toute cette histoire du dossier secret qui, n’ayant pas quitté son armoire, n’avait pu être communiqué aux juges.

  1. Patrie du 16 février 1898. Ce silence est commenté dans l’Aurore du 17.
  2. 18 février.