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LE JURY


publiquement un passage du rapport de d’Ormescheville. Or, c’était un document relatif à l’affaire Dreyfus, de plus secret ; et ainsi se trouvait rompu le pacte de silence que les militaires, eux, avait strictement observé. Cependant, Pellieux ne parlera pas du procès Dreyfus, mais il répétera le mot si typique du colonel Henry : « On veut la lumière ; allons-y ! »

Et, martelant les mots, avec un air de victoire et de défi, il raconta que le ministère de la Guerre avait reçu, au moment de l’interpellation Castelin, « une preuve absolue de la culpabilité de Dreyfus » et qu’il l’avait vue. C’était une note « d’une origine incontestée », « signée d’un nom de convention », mais « appuyée de la carte de visite » de l’auteur de ce billet, « carte qui portait, avec son nom, quelques mots, un rendez-vous insignifiant, et signés du même nom conventionnel ». — Il supposait, comme on voit, que la carte de visite (il voulait dire l’une des pièces de comparaison) accompagnait la note, ce qui eût rendu vraiment la précaution d’un nom de convention par trop illusoire ; et pourquoi, sur sa carte de visite qui portait son vrai nom, l’attaché étranger aurait-il ajouté son nom de convention, se démasquant lui-même[1] ? — Il donna alors de mémoire le texte de la pièce :

Il va se produire une interpellation sur l’affaire Dreyfus. Ne dites jamais les relations que nous avons eues avec ce juif.

« On a cherché la revision du procès par une voie détournée ; je vous donne ce fait ; je l’affirme sur mon honneur et j’en appelle à M. le général de Boisdeffre[2]. »

  1. Jaurès, Les Preuves, 210.
  2. Procès Zola, II, 118, Pellieux,