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LE SYNDICAT


Hanotaux a toujours eu des doutes sur la culpabilité de Dreyfus ; en 1894, il a supplié Mercier de ne pas engager l’affaire ; il a dit, plus tard, qu’elle était le malheur de sa vie. Il a l’habitude des textes : il a pu comparer les écritures. Il est diplomate : il sait la valeur des mots, celle de la communication qu’il vient de recevoir. Entre tous les collaborateurs de Méline, c’est l’intelligence la plus cultivée et la plus fine. Des excuses que peuvent invoquer les lecteurs du Petit Journal, laquelle cet académicien pourrait-il alléguer ?

L’autre jour, Henry, causant avec Paléologue, a fait allusion aux lettres de l’Empereur allemand[1]. Une autre fois, Henry a récité à Paléologue la lettre de Panizzardi à Schwarzkoppen[2]. Lequel de ces faux aurait convaincu l’historien de Richelieu ?

Nul plus que lui n’a été grandi par les événements, par l’Alliance russe. À cette date (17 novembre) son intervention serait décisive. Rien que la menace de sa démission ferait pencher la balance. Il n’a qu’un mot à dire : qu’il ne saurait, au nom de la France, donner à entendre à un ambassadeur, qui a fait auprès de lui une démarche solennelle, qu’il le tient pour un fourbe. Il se tait. Assurément, les communications qu’il reçoit, il ne les garde pas pour lui ; correctement, il les transmet à Billot, en informe Méline et Félix Faure. Mais juger entre Dreyfus et Esterhazy n’est pas de son emploi.

    pel de M. Ressman, qui offrait une coïncidence extrêmement singulière, n’avait cependant trait en quoi que ce soit à l’affaire qui nous occupait à ce moment-là. » (I, 223). La coïncidence du rappel de Schwarzkoppen, en 1897, était plus « singulière » encore.

  1. Cass., I. 393, Paléologue.
  2. Paléologue place cette conversation en septembre ou octobre, l’autre dans les premiers jours de novembre.