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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS

C’était convier ouvertement l’armée à le recommencer.

Précédemment. Brunetière s’était converti avec éclat à un catholicisme offensif : « L’idée chrétienne, c’est l’absolu… Le catholicisme, c’est la France, et la France, c’est le catholicisme… Je l’avais souvent entendu dire : je l’ai vu, j’en suis convaincu[1]. » Et il s’était incliné devant le mystère, la foi au surnaturel.

Sans la connaissance de ces incidents et de l’état des esprits qu’ils révèlent, l’histoire que je raconte serait inintelligible.

Les avertissements n’avaient pas manqué au parti républicain qui, à son ordinaire, ne les avait pas écoutés. — L’auteur de ce livre écrivait en 1895 : « Le passé n’est jamais mort, il ne fait que sommeiller ; l’histoire est pleine de ces réveils… Tout ce que le xviiie siècle, Encyclopédie et Révolution, avait cru détruire, n’est qu’engourdi ; cette mort apparente n’est qu’un sommeil réparateur ; les tombeaux se rouvrent, presque tous les vieux préjugés que nous avions appris à considérer comme des curiosités historiques rentrent ou s’apprêtent à rentrer dans la politique avec une force menaçante[2]. » — Bien plus, les républicains eux-mêmes, les uns (les radicaux), sous prétexte qu’ils avaient trouvé un meilleur système fiscal, les autres (les socialistes), en préconisant la guerre des classes, d’autres encore (les modérés), en laissant se reformer les congrégations, contribuèrent à faire perdre au pays de la Révolution le sens de la Révolution. Quand le Gésu

  1. Discours prononcé à Besançon, dans la salle de la maison des Carmes, sous la présidence de l’archevêque, février 1898.
  2. Les réveils du Passé, dans le Matin du 21 avril 1895. Cet article est reproduit dans le volume intitulé : Démagogues et Socialistes, 196.