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LA CHUTE DE MÉLINE


fille Pays que Du Paty était l’auteur ou l’inspirateur des faux télégrammes[1].

Bertulus, toutefois, ne laissait pas d’être assez embarrassé ; il avait, sur l’indication de Picquart[2], fait procéder à des comparaisons entre l’écriture de Du Paty et celle de la dépêche Blanche ; l’expertise avait été favorable à Du Paty[3]. Le soupçon de Picquart se porta alors sur Mme Du Paty que Christian avait mise en cause ; l’expertise fut de nouveau négative. Pour Du Paty, il n’avait pas cessé de protester qu’il n’était pour rien dans l’affaire des télégrammes[4].

On se trouvait donc, de ce côté, dans une impasse, et pour une raison très simple : c’est que les faux télégrammes, imputés à Du Paty, étaient l’œuvre d’Esterhazy et d’Henry. D’autre part, comme les révélations de Christian, témoin personnel en ce qui concernait son cousin, ne laissaient place à aucun doute, le juge s’enhardit à faire ce qu’il avait retardé jusque-là : à citer Esterhazy lui-même. Picquart l’avait accusé à nouveau d’être l’auteur des articles de la Libre Parole, sous la signature « Dixi », et en avait fourni une très ingénieuse démonstration[5]. Un rapport de police donnait un renseignement identique[6]. C’était sur Esterhazy qu’il fallait marcher.

Esterhazy, à ce moment, ne savait encore rien de la visite de Christian à Labori ; il pensait l’avoir intimidé, s’être débarrassé de lui, et il avait repris son train de

  1. Cass., II, 238, Christian Esterhazy.
  2. Ibid., II, 217, 230, Picquart ; 268, Bertulus.
  3. Enq. Bertulus, expertise Couderc, 28 février et 1er mars 1898. — Cass., II, 34, 38 ; Rennes, III, 504, Du Paty : Cass., II, 268, Bertulus.
  4. Cass., II, Du Paty, (Enq. Bertulus, 29 mars 1898).
  5. Ibid., II, 221, Picquart (5 mai 1898).
  6. Rapport du commissaire Bernard (4 mai 1898).