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DÉFENSE RÉPUBLICAINE


sent été des triomphes si la République elle-même n’avait paru menacée[1] : le retour de Zola, le départ d’un croiseur pour ramener Dreyfus, la mise en liberté de Picquart.

Nous avons raconté en son temps[2] que Leblois, en se pourvoyant contre l’arrêt de la Cour de cassation en règlement de juges, avait eu pour objet de soustraire Picquart au conseil de guerre tant que les juges civils n’auraient pas prononcé sur Dreyfus. Il avait pris cette sage précaution d’accord avec Picquart, qui, lui-même, avait attendu la veille de la Revision pour déposer une demande de mise en liberté provisoire[3]. Leblois s’étant désisté quelques jours auparavant[4] de son pourvoi, qui n’avait aucune valeur juridique, la Chambre des mises en accusation put enfin juger au fond. Le substitut Blondel donna aussitôt ses réquisitions[5] ; fondées comme de droit sur l’arrêt en revision, elles concluaient au non-lieu et à la mise en liberté du principal accusé. Les juges ordonnèrent d’abord que Picquart fût relâché (après trois cent vingt-quatre jours de détention), puis prononcèrent le non-lieu (9 et 13 juin). Ainsi Leblois fut mis entièrement hors de cause et Picquart n’avait plus à répondre que pour l’affaire Boulot et celle des pigeons. D’ailleurs Zurlinden donna l’assurance que le mandat de dépôt décerné contre lui par son parquet ne serait pas exécuté et qu’il ne le renverrait pas au Cherche-Midi.

  1. Jaurès : « Ne dispersons pas notre énergie. » … La grande flamme de vérité jaillira toujours plus haut, mais il faut pour cela que la pierre même du foyer, c’est-à-dire la République, ne soit pas renversée. » (8 juin 1899.)
  2. Voir p. 24.
  3. 18 mai.
  4. 12 mai.
  5. 6 juin.