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CHAMBRES RÉUNIES


pour toutes les ligues : la dissolution et 16 francs d’amende avec application de la loi de sursis[1].

Ainsi Guérin échappa à cause de Duclaux, qui était poursuivi à cause de Déroulède.

Pour la société de Jésus, qui était l’artisan de toute la crise, Dupuy l’ignora. Son souci d’une justice égale pour tous, l’impartialité qui, entendue de la sorte, n’est qu’une forme hypocrite de l’injustice, n’allait pas jusqu’à faire asseoir le père Du Lac sur les bancs de la police correctionnelle.

II

Le Sénat, pour se débarrasser de lui, n’avait qu’à repousser la loi de dessaisissement.

Les sénateurs, quand ils nommèrent leur commission (le jour même de la mort de Faure), s’étaient divisés en deux fractions presque égales : 123 pour la loi et 113 contre, et la majorité, dans la commission, n’était que d’une voix, 5 contre 4[2]. Bérenger et Waldeck-Rousseau, qui prirent la tête de la résistance, essayèrent de déplacer ces quelques suffrages.

Le drame subit de l’Élysée, « le coup terrible » qui frappait les ennemis de Dreyfus, puis l’élection de Loubet, semblèrent d’abord les servir. Visiblement, le courant changeait. Encore quelques jours, et la voix impérieuse des circonscriptions se taira, s’affaiblira ; il n’y aura même plus profit à sacrifier le Droit aux fu-

  1. 19 et 25 avril, 2 mai et 27 juin 1899.
  2. Ouvrier, Pauliat, Guérin, Legludic et Bisseuil, favorables : Bérenger, Cazot, Maxime Lecomte et Morellet, hostiles.