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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


lui avait confectionné le premier dossier secret[1], mais à la même condition qu’alors : de frapper par derrière et dans la nuit.

Il n’était plus, sans doute, le maître de la chambre du conseil ; impossible, cette fois, d’y faire porter par Du Paty le dossier ultra-secret ; cependant, la grande route de la forfaiture était seule fermée ; les sentiers obliques restaient ouverts.

Il continua donc à raconter en confidence qu’il produirait, à son premier témoignage, la formidable preuve, et, mieux encore, il se fit sommer par ses journaux, par Drumont et par Barrès, de tenir sa promesse, la solennelle menace, « acclamée naguère par un auditoire de patriotes », son serment de « tout dire à Rennes, ville qu’arrose le Rubicon », et « coûte que coûte », dût la guerre en résulter[2]. — Coppée surtout, très affaibli, fut impérieux et tragique : « Nous voulons voir en face, s’écriait-il, la vérité, fût-elle hideuse et terrible, et, si c’est la guerre, peut-être sera-t-elle la renaissance et le salut… Ô Jeanne d’Arc, priez pour nous !… Et puis, tout, oui, tout, même un nouveau désastre plutôt que l’enlisement dans la boue et dans la honte. » — Mais, en même temps, il faisait

    qu’il en a une. » (30 juin.) Basch croyait savoir qu’il s’agissait d’une lettre de Mlle de Munster (voir p. 227) où Dreyfus était nommé, mais « Mercier refusera de la lire, à cause des obscénités qu’elle contient et, surtout, à cause des conflits internationaux que pourrait entraîner cette lecture. Ce serait là le plan de Mercier… Nous savons de source sûre que le colonel Jouaust aurait dit à l’un de ses familiers : « Jusqu’ici, c’est l’acquittement ; on me tombera dessus, mais tant pis ! » Le « jusqu’ici » réserve la fameuse déposition de Mercier. » (27 juin.)

  1. Voir t. I, 364.
  2. Journal du 4 juillet 1899, (article de Barrès) ; Gaulois du 6 et Libre Parole du 12.