Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1905, Tome 5.djvu/261

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
251
LE RETOUR DE L’ÎLE DU DIABLE


Négrier de toutes ses fonctions (d’inspecteur et de membre du conseil supérieur de la guerre).

Galliffet, en frappant ce grand coup[1], savait à quels soupçons il s’exposait : de se venger d’un rival et d’obéir au Syndicat[2] ; mais il était, avec ses défauts, un soldat de la vieille école, qui ne mettait rien au-dessus de la discipline, et trop politique pour ne pas apercevoir que l’indulgence, le souci, légitime en d’autres temps, d’éviter le scandale, seraient tenus pour de la peur.

Le fait que les propos confidentiels du colonel Bertrand avaient été dénoncés par un de ses officiers, donna fort à réfléchir. Grand embarras pour les fauteurs de coups d’État si les officiers, entre eux, ne se sentent plus en sûreté.

Déroulède n’en continua pas moins ses préparatifs, parce qu’il eût perdu sa raison d’être en cessant de conspirer, et qu’il s’était halluciné à croire sa revanche certaine. Le conspirateur compte sur le hasard

    d’après sa propre explication écrite. Galliffet n’en ayant donné que partiellement lecture à la Chambre, dans cette séance du 14 novembre, le texte in extenso fut porté à la tribune par le lieutenant-colonel Guérin.

  1. Décret du 25 juillet 1899. — Le même jour, Galliffet frappa de soixante jours d’arrêts de rigueur le capitaine Guyot de Villeneuve. Syveton, professeur d’histoire à Reims et trésorier de la Ligue de la Patrie française, ayant été invité à rejoindre son poste, avait critiqué devant ses élèves l’ordre du ministre (Leygues) et déclamé au sujet de l’Affaire. Le conseil académique l’ayant alors suspendu de ses fonctions, Guyot de Villeneuve lui adressa une lettre de félicitations et un chèque de 4.800 francs, montant de son traitement.
  2. Brunetière, dans la Revue des Deux Mondes du 1er août : Il n’est pas fier des besognes qu’il se croit forcé d’accomplir. Pourquoi forcé ? Et forcé par qui ? » — Chambre des députés, 14 novembre. Galliffet : « Les commandants de corps d’armée sont responsables seulement devant le ministre… À droite : Et Reinach ? »