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RENNES


très fortifié dans mon opinion. C’était un résumé vigoureux de l’Affaire, mais sans aucune violence ni dans le fond ni dans la forme, où il ménageait fort les généraux, Mercier comme Boisdeffre et Gonse, et ne mettait en cause qu’Esterhazy, Du Paty et, surtout, Henry. Peut-être lui eût-on reproché d’abonder trop dans mon sens, en ce qui concernait ce dernier[1]. D’autre part, sans l’association entre Esterhazy et Henry, association qui

    de reconstituer aisément le texte qu’on trouvera ici. Je me suis contenté d’achever les phrases ou les développements, souvent incomplets ou esquissés seulement dans mes notes originales, dont j’ai d’ailleurs donné connaissance à ceux qui étaient autour de moi, au moment même où je les rédigeais. J’ai tenu à ne rien changer aux idées qui toutes, même dans le détail, avaient été dès lors au moins indiquées sur le papier. »

  1. Mes principaux articles sur la complicité d’Henry et d’Esterhazy s’échelonnent du 25 octobre 1898 au 2 août 1899. Avant de les réunir en volume (Tout le Crime), je les résumai dans une grande étude, intitulée le Rôle d’Henry, qui parut dans la Grande Revue du 1er janvier 1900. Le même volume comprend trois articles (des 20, 24 et 25 novembre 1899) sur ce que j’appelais « les petits mystères du bordereau ». — Voir t. IV, 428 et suiv. — Labori reprend, avec beaucoup de force, presque tous mes arguments : « Par quels liens mystérieux Henry était-il attaché à Esterhazy ? Il était depuis longtemps son débiteur, partant son obligé… À la complicité d’Henry, que cette complicité soit d’une sorte ou d’une autre, il y a une objection qui, d’abord, paraît décisive. Pourquoi, recevant le bordereau, Henry ne l’a-t-il pas détruit ? Selon toute vraisemblance, un agent, assez intelligent pour apprécier la valeur du document, en savait l’existence… (C’est ce dont Picquart convenait alors. — Voir p. 392.) Pourquoi Henry n’a-t-il pas dénoncé Esterhazy ? Depuis longtemps ils se connaissaient ; ils s’étaient rencontrés au service des renseignements ; jamais ensuite, ils ne s’étaient perdus de vue… L’écriture d’Esterhazy est une des plus caractéristiques qui soient ; Henry ne peut pas ne pas la connaître ; la connaissant, ne pas la reconnaître. Pourquoi aucune recherche du côté d’Esterhazy ?… Après s’être efforcé, dès le jour de l’arrestation, d’enlever, par un mensonge qui devint un faux témoignage (sur le premier interrogatoire de Dreyfus par Du Paty), tout crédit aux paroles de l’accusé, Henry a joué lui-même le rôle de témoin principal de l’accusation… Il est une