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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


Méline. S’il n’a pas voté l’affichage du discours de Cavaignac, ce n’est point qu’il soupçonnât la fameuse lettre d’être un faux ; comme Cavaignac, comme Brisson, il l’a crue vraie ; « mais il a toujours pensé que l’instruction de l’affaire Dreyfus ne pouvait pas se faire à la tribune ».

Dès qu’on reparlait de l’Affaire, Cuignet reparaissait avec sa marotte, la dépêche Panizzardi. On n’a pas oublié[1] qu’il était convenu dans un procès-verbal, signé de lui comme de Chamoin, que la traduction de la dépêche par le ministère des Affaires étrangères était exacte ; comme il avait, d’autre part, constaté dans une deuxième note, que l’écriture du décalque de la dépêche n’était pas celle de l’ancien attaché italien, il en déduisait maintenant que le décalque était un faux. Lasies fut de nouveau le confident du malheureux, ne lui objecta pas que la dépêche avait été chiffrée apparemment par quelque scribe, porta à la Chambre le texte du deuxième procès-verbal, crut faire merveille[2]. Delcassé fit justice en quelques mots de ces divagations ; sur quoi, le soir même, Cuignet écrivit à Waldeck-Rousseau qu’il maintenait ses accusations et que le ministre des Affaires étrangères était un faussaire. — André l’ayant alors fait venir, Cuignet refusa de répondre autrement qu’en présence d’un officier de police judiciaire. Il était, comme à l’ordinaire, surexcité et buté. André l’envoya au Mont-Valérien, le déféra, par une plainte insuffisamment motivée, à un conseil d’enquête, se fit refuser l’avis de mise en réforme, finalement lui infligea soixante jours, d’arrêts de forteresse.

Tout le temps, Waldeck-Rousseau est sur la brèche. Il est devenu le maître de l’assemblée. Dès qu’il paraît

  1. Voir t. V, 72, 73.
  2. Séance du 17 décembre 1900.