L’autre pièce était l’une de celles que Cavaignac avait lues à la tribune de la Chambre et qui avaient été affichées dans toute la France. Panizzardi écrivait à un collaborateur de Schwarzkoppen que « P… lui avait porté beaucoup de choses très intéressantes. » Henry avait gratté la lettre P et lui avait substitué un D[1].
Déjà, à l’époque du procès de Zola, Du Paty, à qui Gonse avait montré la pièce, soupçonna la fraude : « Jamais, lui avait-il dit, Panizzardi n’a fait un D comme celui-là[2]. » La fraude était si manifeste et d’une exécution si grossière que Bertillon lui-même, un peu plus tard, n’avait pu s’empêcher de la constater ; mais il avait inventé aussitôt cette sottise que le D avait été récrit sur un D[3].
Ici encore, la supercherie fut démontrée par une copie, faite le jour même de l’arrivée de la lettre ; la copie portait l’initiale P… ; Sandherr l’avait mentionnée dans un bordereau daté et signé ; Gribelin la remit à Targe[4].
La découverte de ces deux faux, dont il avait été fait état à Rennes, et non seulement par Mercier et les témoins à charge, mais par le commissaire du gouvernement[5], et sans que la défense pût leur opposer
- ↑ Voir t. IV, 24.
- ↑ Cour de cassation, 22 mars 1904, Du Paty.
- ↑ Cass., I, 500, Bertillon.
- ↑ Cour de cassation, 19 mars 1904, Targe ; 21 mars, Gribelin ; procès-verbal du 6 octobre 1903, signé : Targe, Gribelin, Dautriche. — Une autre copie de la même pièce avait été précédemment trouvée dans un coffre-fort du ministère par le général Zimmer et Targe, qui en dressèrent aussitôt procès-verbal. (30 juillet 1903). — D’après Targe, l’initiale P aurait désigné un officier roumain qui « travaillait » avec Schwarzkoppen et Panizzardi et dont le nom figurait en toutes lettres dans une note du service des Renseignements, du 11 juillet 1896.
- ↑ Rennes, III, 584 et 585, Carrière.