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L’ENQUÊTE

Targe, qui furetait mieux qu’il ne raisonnait, fit encore quelques trouvailles : un télégramme du colonel Guérin rendant compte au général Saussier de la parade d’exécution : « Dreyfus a protesté de son innocence et crié : Vive la France ! Pas d’autre incident[1] » ; le dossier de l’espion Boutonnet d’où résultait que l’instruction sur le chargement des obus à la mélinite avait été livrée par lui en 1890[2] ; celui de l’espion Greiner, condamné en 1892, qui avait livré le rapport de la commission d’expériences de Bourges sur l’obus Robin[3] ; la minute du commandant Bayle, sur l’attribution de l’artillerie lourde aux armées, dont la prétendue disparition, affirmée par Henry, avait été attribuée également à Dreyfus[4] ; et d’autres pièces encore, moins importantes, mais qui confirmaient également l’aveu de Guénée que l’officier juif, traître par prédestination, avait été « la tête de Turc[5] ». Cependant Targe avait eu beau chercher dans tous les services, vider toutes les armoires, ouvrir tous les tiroirs, bouleverser tous les dossiers, il n’y avait découvert ni les photographies des lettres de l’Empereur allemand, ni celle du bordereau annoté, ni aucune note où il en fut question, ni aucune trace, même la plus légère, qu’elles eussent passé à aucun moment par le ministère de la

  1. École militaire, 9 h. 20 du matin, 5 janvier 1895. — Voir p. 447.
  2. Pièce n° 67 du dossier secret ; Cuignet avait relevé cette livraison à la charge de Dreyfus (Cass., I, 369).
  3. Roget l’avait attribué à Dreyfus (Cass., I, 64). — De même, Mercier à Rennes (I, 134), Cavaignac (188) et Gonse (540).
  4. Cass., I, 65, Roget ; 370, Cuignet ; Rennes, I, 483, Mercier ; 530, Boisdeffre ; 546, Rennes. La note (du 27 mars 1893), avec le mot « minute » écrit au crayon par le commandant Bayle, fut retrouvée par le lieutenant-colonel Fournier et le capitaine Hallouin (Cour de cassation, 28 mars 1904, Hallouin).
  5. Cass., I, 726, Guénée.