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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


Guerre. Dix fois, vingt fois, il a recommencé sa chasse ; les lettres, comme le bordereau, comme le mystérieux dossier dont Sandherr n’aurait montré à Henry qu’une seule pièce[1], sont restés introuvables. André questionne Gribelin : « Un bordereau annoté par un souverain étranger faisait-il partie du dossier secret de 1894 ? » Gribelin ne se souvient pas « s’il y avait quelque chose d’inscrit sur la marge du bordereau », ne dit ni « oui » ni « non », penche toutefois « pour la négative[2] ». Pauffin, interrogé à son tour, n’éclaire pas davantage le problème. L’ancien officier d’ordonnance de Boisdeffre, quand il est allé chez Rochefort et chez Drumont, ne leur a dit que ceci : « On ne peut pas substituer Esterhazy à Dreyfus, puisque l’État-Major a des preuves de la culpabilité de Dreyfus[3]… » ; il ne leur a point dit quelles preuves, parce qu’il ne les connaissait pas.

Il y avait quelque chose de singulier, mais aussi de symbolique, à ce que la poursuite d’un faux qui n’avait peut-être jamais existé matériellement et qu’on pouvait presque dire idéal, conduisît à la découverte de tant de faux d’une réalité tangible et qui allaient être les preuves irrécusables de la vérité.

II

L’enquête d’André dura environ six mois (mai-octobre) ; il n’en transpira rien ; personne, ni à la Chambre

  1. Procès Zola, I, 376, Henry.
  2. Interrogatoire du 29 juillet 1903.
  3. 31 juillet et 1er août.