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L’ENQUÊTE


ni au Sénat, ne contesta le droit du ministre à y procéder.

Mon appel dans l’affaire Henry vint en mai devant la Cour[1].

Picquart avait écrit, quelque temps avant, une lettre publique à propos de mon procès, parce qu’il tenait « à se dégager » d’une thèse qu’il considérait comme inexacte. C’était son droit, bien que personne n’eût songé à l’y associer ; pourtant, il ne l’avait point fait encore autrement que dans le privé, depuis près de quatre ans que la cause était pendante.

La lettre de Picquart était adressée au Siècle ; il y convenait qu’Esterhazy et Henry s’étaient connus, puisque « Henry le lui avait dit très franchement » ; mais il contestait que leur amitié eût été étroite et, surtout, il refusait d’admettre qu’Henry eût été le complice d’Esterhazy. Quand Picquart a été mis au courant, étant encore au Cherche-Midi, de mes articles sur le rôle d’Henry, il a protesté aussitôt que je faisais erreur, « prêt d’ailleurs à s’incliner. » si on lui avait fourni quelque preuve. Or, je n’en aurais même pas montré un commencement. « On lui avait seulement raconté beaucoup d’histoires qui rappelaient celles que les adversaires de Dreyfus avaient colportées contre lui. » « La cause de la vérité ne doit pas être servie de cette façon-là[2]. »,

  1. 20 et 22 mai 1903.
  2. Lettre du 25 mars 1903 au directeur du Siècle. — L’occasion (ou le prétexte) de cette lettre était un article publié dans le Siècle du même jour, non signé et intitulé : Le procès Henry-Reinach. « Comme mon nom, écrivait Picquart à Yves Guyot, est plusieurs fois cité au cours de cet article, je craindrais, en me taisant, de paraître approuver les affirmations tendancieuses de votre collaborateur… » Le nom de Picquart était, en effet, cité dans l’article, mais comme il l’avait été dans tous les ar-
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