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L’ENQUÊTE

Le vieux Chambareaud présida ces grands débats avec beaucoup d’autorité. Lui aussi, il ne devait pas entrer dans la Terre promise et la vit seulement du haut de la rude montagne.

On entendit d’abord Targe qu’André avait délégué auprès de la Cour, comme Cuignet l’avait été autrefois par Freycinet, mais qui comprit autrement sa mission ; elle était d’éclairer les juges, non de leur faire la leçon. Il raconta avec clarté l’enquête d’André et les trouvailles qu’ils avaient faites ; pour leur découverte que le faux Henry avait été falsifié, il l’exposa, mais n’insista pas ; et il n’en fut plus question[1].

Des qualités que Gribelin croyait posséder, aucune ne lui était plus chère que sa fidélité à ses anciens chefs ; il crut y avoir manqué, quand il vit le parti qu’André tirait de ses déclarations, et il chercha à les atténuer ; mais Baudouin lui mit les pièces sous les yeux. Il protesta alors contre le rapport du contrôleur Crétin (sur les registres de comptabilité) où il était traité de faussaire, larmoya qu’André lui avait dit « qu’il était un honnête homme et un bon soldat ». Henry, en lui commandant de refaire les registres, a voulu seulement « masquer son agent » (Val-Carlos). Pour lui, bien qu’il eût obéi à Henry, il aurait toujours répondu que l’Espagnol avait touché des subsides » ; personne ne lui aurait fait dire le contraire de la vérité[2].

Val-Carlos déposa le lendemain, commença par jurer « qu’il n’avait jamais touché de mensualités ».

Gribelin ne connaissait pas Val-Carlos[3] ; il avait remis tous les mois 400 francs à Henry pour l’attaché

  1. 8, 19, 21 mars, 11 et 13 juin 1904. — Voir p. 270, note 1.
  2. 21 mars 1904.
  3. Voir p. 260.