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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


cembre, Casimir-Perier n’a eu aucun entretien avec Munster ; si la situation avait été périlleuse à cette époque, peut-être Hanotaux et Dupuy et Mercier lui-même l’en auraient-ils averti ; et, certainement, dit-il, « le ministre des Affaires étrangères de France » ne serait point parti à ce moment pour le Midi.

Hanotaux et Dupuy[1] ne furent pas moins formels : le premier sur ses conversations de décembre 1894 avec Munster, gênantes, mais sur lesquelles ne pesa, à aucun moment, aucune menace ; le second sur les incidents de janvier 1895 qu’il suivit, heure par heure, avec le Président de la République. Hanotaux, absent de Paris le 6 janvier, y rentra le 7 et ne sut rien de la prétendue nuit historique. Dupuy, qui connaissait son homme et comme s’il s’était attendu à quelque nouveau mensonge, précisa que Mercier n’avait pu avoir aucun contact « direct » avec l’ambassade d’Allemagne.

C’était humiliant pour le bon sens français qu’il fallût le témoignage de tant de personnages considérables, d’un ancien Président de la République et de deux anciens ministres, pour détruire d’aussi imbéciles mensonges. Mais le gabarit de Bertillon n’était pas plus absurde et il avait fallu le déférer au Bureau des Longitudes et à l’Académie des Sciences.

Jaurès résuma, dans une claire déposition, son discours d’avril sur le bordereau annoté, apporta les articles des journaux qui, pendant tant d’années, affirmèrent qu’il existait à la charge de Dreyfus une lettre ou une annotation de l’Empereur d’Allemagne[2]. Cependant

  1. Cour de cassation, 2 et 16 mai 1904.
  2. Ibid., 18 avril 1904. — Le docteur Brissaud, l’ingénieur Weiss et le professeur Wyrouboff furent indiqués par Jaurès comme des témoins utiles à consulter. Brissaud savait d’une cliente que Mercier lui avait dit « avoir un témoignage écrit de