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L’ENQUÊTE


appeler de Bourbonne, qui n’a pas été officier, mais policier sous Maupas, est « une sorte d’aventurier », « un être incomplet physiquement et intellectuellement », « un eunuque ». Jamais Stoffel ne lui a dit, pas plus qu’à Robert Mitchell, ou à Rey-Roize, ou au général Schneegans, qu’il avait vu la photographie du bordereau annoté, mais seulement qu’il était certain que cette pièce avait existé ; il en a été informé par une personne aussi digne de foi que les membres de la Cour ; pourtant, il ne saurait la nommer « sans commettre une mauvaise action ». — Il avait dit à Ferlet que c’était Munster, mais la lettre de Munster que j’avais publiée[1] ne lui permettait pas de le maintenir, ou il eût fallu maintenir aussi que Munster et Casimir-Perier avaient juré, sur l’Évangile, de mentir, et il protestait n’en avoir jamais rien dit. — Pour le texte de l’annotation impériale, il l’a donné de mémoire, d’après les journaux, et, par conséquent, ne le garantit point[2].

Mercier avait été entendu avant Stoffel. Depuis un an, le faux impérial s’était collé si étroitement à sa peau

  1. Voir p. 247. — Pour Ferlet de Bourbonne, au contraire, la lettre de Munster (sur les rapports d’Esterhazy et de Schwarzkoppen) et celle que j’avais reçue de Casimir-Perier (sur les lettres de l’Empereur allemand) confirmaient la version. Il me récrivit : « Ces deux témoignages sont précisément la conséquence logique du fait rapporté par le récit. » (29 avril 1903.) Je versai également cette lettre de Ferlet au dossier.
  2. Notes de Stoffel à l’issue de ses dépositions : « 23 avril : Mercier avait déposé en racontant faussement sa conversation avec moi sur la lettre impériale. Il dit que je lui ai affirmé l’avoir vue. 2 mai : Attente dans la salle des témoins où se trouvent l’ignoble Reinach, le général Mercier et trois autres… Le Procureur général me lit la déposition de Ferlet. Longue digression de ma part sur cet imbécile. Hilarité des conseillers quand je le traite d’eunuque… Déposition Rey-Roize. Les bras m’en tombent. Rey-Roize répète toutes les niaiseries de Ferlet, affirme que j’aurais dit tenir de Munster tous mes renseignements… J’écris à Rey-Roize pour rompre. »