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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


eussent passé pour lui en première ligne[1] », — et les lettres de Mollin, les feuilles signées de lui, avec renvoi aux fiches, le démentaient, — le système qu’il avait pratiqué ne restait pas moins « détestable[2] » et profondément corrupteur. Il allégua ensuite les actes d’intolérance, de grossière suspicion, dont avaient été victimes, en d’autres temps, des officiers juifs, puis d’autres faits, inexacts ou puérils[3]. Cela parut le procès de l’armée elle-même, intolérable dans la bouche de celui qui était encore le chef de l’armée. Enfin il reconnut que « Mollin avait été autorisé à demander des renseignements et à en recevoir » ; son tort avait été « d’en donner » ; « le manquement au devoir professionnel était là », et c’était pour cela qu’André avait accepté sa démission.

Guieysse, vieux républicain, qui avait été ministre avec Bourgeois, lui dit rudement : « Vous vous cachez derrière un subordonné. »

Tout le temps qu’il parla, la Droite, le Centre, hachèrent son discours d’interruptions et d’injures. Il ne trouva pas une phrase, pas un mot qui portât. Il dit en

  1. Cinq ans, 332.
  2. C’est ce que dira Combes dans son discours du 17 novembre 1904.
  3. « Qu’un officier de la garnison de Paris « évitait de saluer le président de la République » (l’officier ne le connaissait pas) ; « qu’un colonel avait sorti un fanion portant les insignes de la royauté pour remplacer à la manœuvre le drapeau tricolore » (il dut convenir que le fanion habituel était en réparation et que le colonel ne s’était servi qu’une fois d’un fanion historique, conservé dans la salle d’honneur du régiment). — André ne nomma pas l’officier qu’il mettait en cause. Combes le désigna : « Le colonel dont il était question commandait un régiment à Valence. » Lasies dit aussitôt qu’il s’agissait du colonel de Quinemont. Chautemps, radical, le tenait en haute estime et avait demandé qu’il fût promu général. André l’avait mis à la retraite d’office.