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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1908, Tome 6.djvu/444

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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


progrès politique et le progrès social. Rien que de constater qu’il est lent à venir et d’en souffrir, c’est un progrès. Tant de luttes, de déchirements tragiques, de douleurs, d’héroïsmes et même de crimes, n’ont pas été inutiles. Ni sur les champs de bataille où se heurtent les armées, ni dans les arènes où se mêlent les partis politiques, ni dans les sphères où se rencontrent les idées, il n’y a jamais de victoire ni de défaite complète. Elle aussi, cette victoire de la Justice dans la cause de ce petit capitaine juif, ne sera pas complète. Mais pourtant ce sera la victoire, la plus belle victoire que la France ait remportée sur elle-même, et il n’y en a de telles dans l’histoire d’aucun autre peuple.

IV

Les trois chambres de la Cour de cassation se réunirent en audience solennelle le 18 juin[1].

Il y avait déjà plusieurs mois que Mornard avait achevé son mémoire, Baudouin son réquisitoire écrit[2], Moras son rapport[3], et que le premier président Ballot-Beaupré eût pu procéder aux débats. Mais il avait paru sage à Rouvier d’abord, puis à Sarrien, de les ajourner après les élections. S’ils ne doutaient pas que la requête de Dreyfus serait accueillie, ils étaient

  1. Elles avaient procédé, le 15 et le 16, à l’examen du dossier secret.
  2. Revision du procès de Rennes, I, 370, Baudoin : « Voilà plus d’un an que, personnellement, je suis prêt et que j’attends. »
  3. Décembre 1905.