Ayant eu l’idée de lui demander comment Saussier avait accueilli le rapport qu’il lui avait fait des propos de Lebrun-Renaud, il me répondit aussitôt que le général observa que les aveux concordaient mal avec l’obstiné cri d’innocence de Dreyfus[1] ; puis, comme je lui reprochais de n’avoir pas fait connaître cette remarque de Saussier, quand il avait déposé à Rennes, il me dit d’abord que la question ne lui avait pas été posée, ce qui était vrai, et, enfin, comme je le pressais, que Saussier l’avait prié de ne pas le mettre en cause. Je lui déclarai qu’il était de son devoir de faire connaître à la Cour de cassation cet incident dont il avait eu le tort de se taire ; il comprit qu’il le devait pour son honneur et en écrivit en conséquence à Baudouin[2]. Mais celui-ci, ayant son siège fait, retourna la lettre contre Guérin, l’accusant de bassesse : il l’avait seulement écrite « parce que le vent semblait avoir tourné[3] ». Moras, au contraire, mit hors de doute la loyauté du vieux soldat[4].
V
Le bruit des coups portés par Baudouin à tant de gens, réveilla l’opinion. Nulle fièvre, mais, de nouveau, une dernière fois, un intérêt fort vif. Ce brûlant, cet endiablé réquisitoire, on le lut comme un roman.