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LA REVISION


Cour, aurait pu prononcer la cassation sans renvoi en dehors de toutes conclusions de la défense, mais elle n’en avait pas eu l’audace et, s’abritant de Dreyfus, elle avait reculé devant toute la justice. De là, l’erreur nouvelle de Rennes, une nouvelle faillite de la justice militaire qui avait rejailli sur l’armée, et qui aurait été suivie peut-être de longs troubles, sans l’amnistie, et, sans la grâce, de cette douleur qu’un innocent avéré fût mort en prison. Ainsi étaient apparus le vice profond du premier arrêt de la Cour et les conséquences de la faute qu’on commet toujours, lorsque, voyant tout son devoir, on ne le remplit pas tout entier.

Enfin, Dreyfus, s’il réclamait tout son honneur d’officier et ne le voulait tenir que de la raison seule et de l’évidence, ne voulait que son honneur. Nulle indemnité. Simplement la publication de l’arrêt au Journal officiel et dans un certain nombre de journaux, et l’affichage à Paris et à Rennes[1].

Mornard avait lutté longtemps contre cette volonté de Dreyfus. Il lui semblait que « le défaut de réparation », après tant de souffrances physiques et morales et « l’énorme préjudice matériel », constituait une manière d’atteinte à la justice, et, encore, « qu’elle était contraire à la dignité même du pays ». Il eût voulu que le recouvrement d’une large indemnité, dont Dreyfus aurait fait ensuite tel usage qui lui aurait paru le meil-

    grave, le plus caractéristique, le plus décisif en faveur de Dreyfus), à savoir que la reconstitution du bordereau par Bertillon est inexacte et tout le système de l’anthropométreur sans valeur. (I, 536 et 537.) Mornard, de même, invoque l’expertise Darboux comme un fait nouveau ; Baudouin se rallie à cette conclusion.

  1. Mémoire, 720 ; Revision, II, 474, Mornard.
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