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LA REVISION


ments qui sont là pour lui rendre honneur. Il voit ceux qui ont assisté à la parade d’exécution. Et il entend, il n’arrête pas d’entendre les cris : « À mort ! » de la foule hurlante.

Le général de brigade Gillain, commandant la première division de cavalerie, arrive, en uniforme de parade. Il passe devant le front des troupes, se place au centre de la cour, tire son épée. Le colonel Gaillard-Bournazel appelle : « Les officiers légionnaires ! »

Dreyfus et Targe avancent, prennent position devant le général.

« Ouvrez le ban ! » Quatre appels de trompette.

Au milieu d’un grand silence, la voix du général, claire et forte, appelle les deux officiers. Il décore d’abord Targe. Au fond de la cour, quelques cris : « Vive la République ! Vive l’armée ! »

Le vieux général s’avance vers Dreyfus : « Au nom du Président de la République, et en vertu des pouvoirs qui me sont conférés, commandant Dreyfus, je vous fais chevalier de la Légion d’honneur. »

L’épée du général retombe trois fois sur l’épaule de Dreyfus. Il épingle la croix sur le dolman noir, embrasse sur les deux joues l’homme de l’île du Diable. « Vous avez, lui dit-il, servi autrefois dans ma division ; je suis heureux d’avoir été chargé de la mission que je viens d’accomplir. »

Les trompettes sonnent pour fermer le ban. Les regards se tournent vers deux fenêtres, l’une où paraît Lucie Dreyfus qui pleure, l’autre où se dessine la silhouette mince du général Picquart. On crie : « Vive Picquart ! » Picquart répond : « Non, non, Dreyfus ! » Des cris multiples éclatent : « Vive l’armée ! Vive la République ! Vive la vérité ! »

Le général s’entretient avec Dreyfus pendant qu’ar-