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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS

S’il fait observer que le manuel a été envoyé dans les corps, c’est qu’il a eu son exemplaire d’un officier d’artillerie, étant lui-même étranger à l’arme. Il n’en est que le détenteur et doit le rendre[1]. Il offre de le faire copier. Un major de régiment a des copistes, des secrétaires à sa disposition ; un stagiaire à l’État-Major de l’armée n’en a pas[2]. Un artilleur n’eût pas écrit « hydraulique » pour « hydropneumatique »[3] du frein qu’a inventé le commandant Locard ; ni « comment la pièce s’est conduite » au lieu de « comportée »[4] ; ni « un nombre fixe » pour « un nombre déterminé d’exemplaires »[5]. Un artilleur, sachant ce dont traite le manuel de tir, en eût donné exactement le titre[6] ; il ne s’en serait pas remis à son correspondant, officier

  1. Rennes, III, 174, Sebert.
  2. Procès Zola, II, 105, Picquart.
  3. Cass., I, 474, Sebert ; I, 517, Ducros ; I, 561, Hartmann. À la question si un artilleur a pu dire : « hydraulique » pour : « hydropneumatique », le général Deloye répond : « Ces études étaient confidentielles ; on savait que le frein contenait un liquide ; de là cette expression hydraulique, employée longtemps par ceux qui n’étaient pas immédiatement initiés aux questions techniques. » (Cass., II, 330.) Et de même, à Rennes : « Il est certain qu’hydropneumatique est la seule expression réelle. » (II, 60.) Mais il n’est pas certain qu’Esterhazy ait voulu parler de l’hydropneumatique ; c’est une hypothèse assez plausible, mais ce n’est qu’une hypothèse. Le colonel Schneider, attaché militaire d’Autriche, a semblé indiquer, dans sa conversation avec Émile Picot, membre de l’Institut, qu’il s’agissait du frein hydraulique du 120 long. (Rennes, III, 53.)
  4. Du Paty lui-même, dictant à Dreyfus la lettre du 15 octobre, dit : « Une note sur le frein hydraulique du canon de 120 et sur la manière dont il s’est comporté aux manœuvres. »
  5. Rennes, III, 174, Sebert.
  6. « Manuel de tir de l’artillerie de campagne » implique, chez l’envoyeur, l’idée qu’il s’agit d’un manuel destiné à cette subdivision d’armes qui s’appelle l’artillerie de campagne. Le titre exact est « Manuel de tir d’artillerie de campagne » ; le manuel, en effet, traite du tir de campagne, comme il y a un manuel pour le tir de siège et pour le tir à la mer. (Cass., I, 475, Sebert ;