Page:Joubert - Pensées 1850 t1.djvu/123

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La religion est pour l’un sa littérature et sa science ; elle est pour l’autre ses délices et son devoir.

ô religion ! Tu donnes une lumière à l’ignorance, une vertu à la faiblesse, une aptitude à l’ineptie, un talent même à l’incapacité.

Aucune doctrine ne fut jamais aussi bien proportionnée que la doctrine chrétienne à tous les besoins naturels du cœur et de l’esprit humain. La pompe et le faste qu’on reproche à l’église ont été l’effet et sont la preuve de son incomparable excellence. D’où sont venues, en effet, cette puissance et ces richesses poussées à l’excès, si ce n’est de l’enchantement où elle mit le monde entier ? Ravis de sa beauté, des millions d’hommes la comblèrent, de siècle en siècle, de dons, de legs, de cessions. Elle eut le don de se faire aimer, et celui de faire des heureux. C’est ce qui fit tant de prodiges ; c’est de là que lui vint son pouvoir.