Page:Joubert - Pensées 1850 t1.djvu/62

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eu silence, par de sérieuses études philosophiques, à la science du gouvernement des peuples, et, dès le commencement de ce siècle, il consignait dans un écrit célèbre le fruit de ses premières méditations. Il ne m’appartient pas d’examiner ici l’ouvrage qu’il fit paraître à cette époque sous le titre d’essais de morale et de politique ; je n’en parle que parce que le manuscrit en fut par lui communiqué à M. Joubert. C’était un hommage rendu à la supériorité de cet esprit éminent, hommage dont le retour ne se fit pas attendre. Singulièrement frappé des efforts tentés par un si jeune homme pour rattacher les théories de la liberté aux observations d’une saine psychologie et aux grands principes de religion et de morale que tant de nuages venaient d’obscurcir, M. Joubert paya de conseils utiles la conGance qui lui était donnée ; mais comme il ne savait pas se livrer à demi, l’affection vint bientôt à la suite des conseils. Il trouvait d’ailleurs chez M. Molé des qualités qu’il tenait en grande estime : de l’ardeur sans emportement, le culte sincère du devoir, et cette sorte d’austérité qui dénote la pureté de la jeunesse et présage l’incorruptibilité de l’âge mûr ; il l’appelait « son Catonde vingt ans. »

À l’époque où cette liaison commençait, unepeine profonde vint désoler son âme. Madame deBeaumont, que ses médecins avaient envoyée en Italie, ne tarda pas à y succomber au mal sans remède dont elle était atteinte. Elle mourut à Rome, le 4 novembre 1803 ; et pendant qu’une illustre amitié faisait graver sur sa tombe ce verset de Jol> souvent répété par elle : « Quare misera data est lux cl « vita his qui in amaritudine unimœ sunt ? Pourquoi « la lumière a-t-elle été donnée au misérable et la vie a