Page:Joubert - Pensées 1850 t2.djvu/114

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danger de montrer ses bornes. Il ne faut porter à ces extrémités ni son talent, ni sa force, ni sa dépense.

Il faut éviter, dans toutes les opérations littéraires, ce qui sépare l’esprit de l’âme.

L’habitude du raisonnement abstrait a ce terrible inconvénient.

Pour produire une pensée, il ne faut que de la chaleur et du mouvement, je veux dire une conviction et un jugement. Mais une idée est le résultat, l’esprit, la pure essence d’une infinité de pensées. Pour la mettre au jour, il faut une notion exacte et claire, et des paroles transparentes. Or, on ne saurait y parvenir, sans laisser longtemps fumer sa tête, afin que l’esprit soit plus net ; sans donner à son premier aperçu le temps de quitter sa lie, enfin sans polir ses mots, comme les verres se polissent.

Les beaux sentiments et les belles idées que nous voulons étaler avec succès dans nos