Page:Joubert - Pensées 1850 t2.djvu/329

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324 le mattrc du monde. Il serait temps qu’ils comprissent que, pour le bonheur et le veritable succes, Fimportant n’est pas de vouloir fort, mais de vouloir justc. Cela vous paraltra vrai et clair dans le sens ou tout le monde entend le mot de volonté; mais peut-étre u’est-ce plus aussi vrai dans le sens strict que la rigueur de l’é- cole a quelquefois attache a ce mot. Il ne s’agit plus alors que de savoir quel est le meilleur, pour etre utile et pour etre entendu, de prendre les mots dans le monde, ou de les prendre dans l’ecole. Je soutiens qu’il vaut mieux les employer dans le sens populaire que dans le sens philosophique, et, mieux en- core, dans le seus naturel que dans le sens populaire. Peutends , par le sens naturel , Pacception populaire et universelle, reduite a ce qu’elle a d’essentiel et d’inva- riable. _ Prouver par la definition ne prouve rien, si celle-ci est purement philosophique; car, selon moi, ces definitions _ n’obligent que ceux qui les font. Prouver par la definition, lorsqu’elle exprime l’idée necessaire, inevitable et claire qu’on se fait géneralement de l’objet, des qu’il est nom- me , prouve tout, au contraire , parce qu’on ne fait alors que montrer aux autres ce qu’ils pensent , malgre eux et a leur insu. i _ La regle qu’on est le maltre de donner aux mots le sens · qu’on vent, et qu’il ne s’agit que de fixer celui qu’on leur- donne, est fort bonne pour la simple argumentation, et peut etre admise dans les salles de cette espece d’escrime ; mais, dans la mempuysique ingenue et noble, et dans Ie veritable monde littéraire, elle ne vaut rien. Il faut ue jamais perdre les realites de vue, et n’em—~ ployer ses expressions que comme des milieux , des ver-i ir. 24