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GEORGES RODENBACH

les expositions de peinture intéressantes, le rêveur garde au fond de lui la souvenance des modulations de l’harmonium, du parfum grisant des encensoirs, des chuchotements bruissant dans les ténèbres des églises, des songeries solitaires au bord des canaux déserts, des terreurs vagues de l’inconnu, des préoccupations obsédantes de l’Au-delà.

Fervent admirateur des de Goncourt, — un nom qui revient machinalement à l’esprit dès qu’on parle d’art, — Rodenbach a cherché, lui aussi, à se servir de la plume comme d’un pinceau ; sa forme colorée enserre et moule sa pensée ainsi qu’un tissu précieux recouvre le corps. Sa fierté rejette le mot quelconque, l’à peu près courant, l’épithète aveulie, et n’accepte que l’expression rare, la phrase personnelle, la ciselure délicate et artiste. Dans la prose et dans les vers, même horreur du convenu, même aristocratie cérébrale. Qu’il écrive Bruges-la-Morte ou le Règne du silence, l’auteur analyse les impressions jusqu’à