Page:Jourde - Souvenirs d’un membre de la Commune.djvu/97

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Ossud, qui, lui aussi, voulait avoir l’honneur de ma prise et de mon exécution, s’emporta avec une grande violence contre son indiscret et ambitieux collègue. Mais il fallait obéir.

Nous nous rendîmes immédiatement au ministère des affaires étrangères.

Je fus, à mon arrivée, mis en présence d’un commandant des gardiens de la paix nommé Vidal, je crois, et du fameux Claude, de la police de sûreté, qui se ruait sur tous les prisonniers qui arrivaient et les accablait d’injures et de coups.

Des fusiliers marins, campés dans la cour, nous faisaient entendre les plus odieuses menaces. Encouragés par leurs chefs, ces braves nous jetaient à la tête tout ce qui tombait sous leurs mains. En quelques minutes, je fus couvert de boue et d’immondices.

Après un rapide interrogatoire, on me fit passer dans une chambre voisine. À peine y étais-je enfermé que de grandes clameurs s’élevèrent dans la cour, les cris : « À mort, à mort la voleuse ! » dominaient le tumulte. Quelque chose d’humain fut littéralement jeté dans la chambre où je me trouvais.

Je vis debout, près de moi, une jeune fille, une enfant de quinze ans. C’était une petite ouvrière, très coquettement vêtue. Sa mise, bien que modeste, était rehaussée par ce je ne sais quoi plein de goût qui donne un charme si grand à l’ouvrière parisienne.

Elle paraissait plutôt surprise qu’effrayée et semblait ne rien comprendre à ce qui lui arrivait.