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246 JOURNAL DE MARIE LENÉRU

21 aoûk.

Encore à faire des yeux.

Cet hiver, la lecture aux lèvres, une publication,

Sortir avec les Oratoriennes pour décider de ma vie au point de vue charité. e

Me situer. Je ne veux que Paris. Et recevoir dès que les lèvres des autres parleront,

Je le vois à la vie des autres, Je ne puis compter que sur moi, fût-ce pour m’entourer.

Remettre l’Italie tant que je serai anxieuse « sans état et comme sans être ».

25 août,

Ils se croient nerveux, parce qu’ils s’impatientent, parce qu’ils s’agitent et deviennent insupportables pour un retard, une corvée de la vie matérielle, parce qu’ils sont démontés et malades pour une incertitude, un objet perdu. Nerveux.. puisqu’il le faut, mais de quels nerfs !

C’est l’affinement des nôtres qui nous rend impossibles des nervosités si grossières. Que de choses laissent calmes ces ner- veux ! Quand nos dents grincent mille fois par jour, quelle imperturbabilité, pour dire comme Baudelaire, quelle imper- méabilité !  :

Une réaction naturelle me rend, au contraire, plus aimable envers une corvée, caisses, rangements.

Je suis très convaincue de la superfluité luxueuse de ces « nécessités de l’ordre pratique », de la. gratuité amusante de notre fantaisie d’exister.

Je ne puis m’empêcher d’avoir pitié de la vie et toujours, à toute seconde, je suis avec elle en émotion esthétique, et c’est pour les grossiers, qui font du tapage, que je réserve tous mes nerfs.

Or, je n’en suis pas là du tout par philosophie, je suis née ainsi, et demeure persuadée que tous les êtres gais « doués