245 JOURNAL DE MARIE LENÉRU
Un effort physique, intellectuel, moral, quel est l’homme, la femme surtout, capable de les fournir, qui désire même les fournir ?
Je peux à peine me faire croire en disant que les sciences occultes m’intéressent moins que les autres. Aucune méfiance obtuse à leur égard ! Mais les « phénomènes occultes » d’ail- leurs assez monotones, ne m’amusent pas plus que les chimi- ques. Ils m’étonnent même moins, car j’aurais pu les imaginer.
Un fait est bien peu de chose par rapport à nous, aussi ex- traordinaire que vous le vouliez. C’est le commentaire, l’effort humain pour le saisir, l’hypothèse, la méthode, qui lui donne vraiment du prolongement et qui nous intéresse,
ER bien ! les sciences occultes n’ont pas eu leur homme de génie, elles n’ont pas plus accru l’eftort que le rêve humain. Elles ont moins enrichi notre imagination qu’un pas de l’as- tronomie ou de la géologie, Elles n’ont rien découvert.
Je suis à des lieues de l’anti-mysticisme, je serais même ennuyée qu’il n’y eût rien d’inconnaissable, mais ma concep- tion du mystère est bien trop haute et générale pour que je me croïe plus proche de lui à un moment donné qu’à un autre.
Le mystère est partout et non pas ici et là. La science ne part pas d’ailleurs pour aller « s’y heurter ». Elle sait depuis longtemps ce qu’elle ne comprendra jamais, elle est même seule à le savoir. Vous ne pouvez pas changer au mystère la place qu’elle lui a assignée, vous ne pouvez même pas lui fournir un nouveau postulat.
La science, agenouillée devant le mystère, sous les espèces Sacramentelles de ses « idées dernières » y communiant chaque jour, n’a aucune raison de s’émouvoir pour le saluer ici ou là. Pas plus que saint Louis n’en trouvait à quitter le Saint-Sacre- ment pour l’annonce dans la rue d’un passage de Jésus-Christ.
À M. B. : Moi, tant pis ! j’ai besoin qu’on m’estime, pour ne pas dire plus, car je mets aussi dans mes préférences un senti-