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ANNÉE 1901

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ment très voisin de l’admiration. Je n’aime que ce qui est su- périeur, pour me rendre j’ai besoin d’être séduite..

Vous savez, vous aurez beau sophistiquer, vous êtes aussi nihiliste que moi. Seulement, je me suis ennuyée davantage et cela me donne l’air plus dégoûtée.

Si j’avais été également pessimiste, mais cardiaque ou tuberculeuse, au lieu de ce que vous savez, je suis certaine que je ne me serais jamais ennuyée avec ce dévergondage. Cela rend terriblement « sensualiste » allez, ma petite aventure ! J’ai assisté à un tel réflexe de la vie, j’ai tellement senti le manque d’âme, j’ai perdu de tels morceaux de conscience avec ces organes, cela m’a paru très physiologiquement le procédé de la mort.

20 septembre.

Je suis amortie. Parfois j’ai peur de guérir, épouvantée du travail de la réparation.

Je n’ai plus rien à dire.

Pour des aperçus nouveaux dans ma psychologie, pour repêcher ce Journal en train de tomber il faudrait guérir.

Je passe la maïn. Avis à ceux qui ont gagné à la loterie de la Ste-Guillotine.

21 septembre.

Encore s’il n’y avait pas la musique ! Je ne pardonne pas la musique. Ce qu’il m’en est resté ! J’en suis poursuivie. Tout un jour les rapsodies hongroises de Liszt, les sonates de Beetho- ven. Je n’en étais pas hélas ! à jouer encore les symphonies. Le Largo de la Schiller Marsch que j’aimais tant petite fille.

Des demi-phrases, à peine une mesure de l’orchestre, des souffles de tout le Roi d’Ys. Et les souvenirs d’enfance, les déchiffrages à quatre mains de Mendelssohn, le Retour au Pays, les Grottes de Fingal, Athalie ! Du Trez-Hir à Brest, l’emballe- ment de Ruy Blas ne m’a pas lâchée.