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370 JOURNAL DE MARIE LENÉRU

muniquera son énergie, quand le jour, lointain encore, sera venu, de lutter dans un bien autre sens, de nous opposer, comme si cela dépendait de nous seuls, à ce qu’elle puisse ja- mais, sur la terre, se représenter deux fois. — Luxe admira- ble de dévouements mais auquel il faudra, dans l’avenir, nous opposer par les plus farouches lois somptuaires.

IL juin.

A Mme Duclaux : — Je suis tombée dans Péguy sur une ré- flexion si parfaite, dans Nofre Patrie, à propos de Combes : Il est aujourd’hui démontré qu’un homme peut impunément exercer un césarisme impitoyable dans la République, pourvu qu’il ne soit pas bel homme, qu’il ne soit pas militaire, qu’il porte mal même les tenues civiles, surtout qu’il ne sache pas monter à cheval.

Pour autant qu’on peut se souvenir des pièces contempo- raines, il me semble que notre théâtre fourmille de coups d’État civils. On nes lapercevait seulement pas du côté sédi- tieux. En ce monde, il n’y a donc de vrai que le prestige, il n’y a danger que là où l’amour commence, celui des femmes, ou celui de la foule. — À propos du Madhi.

À Mme Dus… : J’admire de tout mon cœur, mais je ne me résigne pas, et si j’accepte pour cette guerre encore, après ce sera complètement fini. Je ne discuterai même plus. L’infir- mière qui veille un grand blessé ne se demande pas si la guéri- son est une utopie, s’il est plus beau que l’homme soit un mar- tyr. Elle sait qu’elle doit le guérir et donne sa vie pour cela.

J’ai beaucoup d’espoir dans le parti socialiste. Son dernier manifeste est excellent. Ils veulent /oute cette guerre, mais ils réclament à la Paix, comme les socialistes anglais, comme les pacifistes américains, cette fameuse force internationale de sanction. Or, ils sont au pouvoir, en France et en Angleterre. Ceux qui regardent l’avenir dans le passé apprendront peut-