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Page:Journal asiatique, série 1, tome 3.djvu/157

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donner ce soin, et de ne point nous exposer, au milieu de ce jardin, à la risée des saules et des fleurs. »

Lieou-thsing fit effort sur lui-même pour ne plus penser à la jeune fille, et les deux amis se mirent à boire, à causer et à rire, jusqu’à ce que le soleil se fût caché dans l’occident. Alors ils montèrent à cheval, et retournèrent à leur hôtel.

La fille du major-général Tchao se nommait Houng-choui. Elle était née avec une beauté incomparable et une pénétration extraordinaire. Elle avait bien deux frères ; mais leur science se bornait à monter à cheval et à tirer de l’arc ; du reste ils ne savaient pas un mot de littérature. La jeune Houng-choui n’avait eu ni précepteur ni compagnon d’étude, mais elle avait reçu de la nature de si merveilleuses dispositions, qu’il lui suffisait, pour savoir et comprendre, d’avoir vu ou entendu. À l’âge d’onze ou douze ans elle pénétrait le sens de tous les livres ; à l’âge de quatorze ans elle composait parfaitement ; enfin c’était un docteur féminin. Aussi son père, dont elle était le secrétaire général, l’aimait-il comme ce qu’il avait de plus précieux. Parmi les officiers ses collègues il y en avait bien qui auraient souhaité sa fille pour bru ; mais connaissant l’excellence de son mérite littéraire, ils pensaient avec raison que le major Tchao ne voudrait pas donner sa fille à quelque héros brutal de l’armée. Aussi aucun d’eux n’avait osé en ouvrir la bouche.

En conséquence, la jeune fille était parvenue jus-