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Page:Journal asiatique, série 1, tome 3.djvu/9

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reuses. C’est ainsi qu’on peut tirer parti des erreurs mêmes en faveur de la vérité, et faire tourner les fables au profit de l’histoire. Car enfin, la vérité est une, et peut se trouver partout sans rien prouver ; mais le champ du mensonge est immense, et, quand on s’y rencontre, il faut bien qu’il y ait quelque raison pour cela. Que deux hommes raisonnent juste à trois mille lieues l’un de l’autre, cela n’a rien d’extraordinaire, et peut s’attribuer au bon usage qu’ils font de leurs facultés. Mais s’ils se trompent tous deux sur le même sujet, et précisément de la même manière, il y a à parier que leur méprise vient d’une source commune, et qu’ils ont eu le même instituteur.

Il y a ainsi telle erreur grossière qui a fait le tour du monde plus vite que n’aurait pu faire une vérité, et dont on est bien embarrassé de suivre la marche et de tracer l’itinéraire. Comment se fait-il, par exemple, que ces notions fantastiques par lesquelles les anciens savaient si bien suppléer au défaut de connaissances géographiques, aient été portées à l’autre extrémité du continent ? Les hommes sans tête, qui ont les yeux sur la poitrine ; ceux dont les oreilles sont si grandes, que l’une leur sert de matelas quand ils sont couchés, tandis qu’ils s’enveloppent de l’autre comme d’une couverture ; les amazones, les pygmées et leurs combats avec les grues, les cyclopes et tous ces monstres dont l’imagination des Grecs avait peuplé les régions qui leur étaient inconnues, reparaissent chez les Mythologues de l’Asie orientale. Les mêmes