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PREMIÈRE SECTION.

L’histoire hindoue de Kachmir assure que la belle vallée qui forme ce royaume fut primitivement un vaste lac, nommé Satîsaras[1]. Ce récit a été adopté par les auteurs mahométans, et se trouve aussi d’accord avec les traditions locales de cette contrée.

C’est Kas’yapa, personnage saint, qui, d’après les historiens hindous, fit écouler les eaux qui couvraient cette vallée. Il était fils de Marîchi, fils de Brahma ; les écrivains mahométans l’appellent Kachef ou Kacheb, et plusieurs d’entr’eux prétendent qu’il fut un deo ou génie, et serviteur de Soliman, sous les ordres duquel il effectua le desséchement du Kachmir. Pour exécuter cette tâche, il pratiqua, près, de Baramauleh[2], un passage à travers des montagnes, par lequel l’eau s’écoula. Le récit hindou n’indique pas le moyen dont Kas’yapa se servit pour saigner la vallée. Cependant il n’est pas improbable qu’elle était originairement un grand réservoir, et il est de même possible, comme Bernier le suppose, qu’une convulsion de la

  1. Satî signifie une femme vertueuse, et saras un lac ; Aboulfazl le nomme le Lac d’Ouma, femme de Mahâdeo, qui, parmi d’autres noms, porte celui de Satî, dont la signification est épouse vertueuse. Ayeen Akberi, II, 169.
  2. Le Wakiat-i-Kachmir donne une autre légende relative à l’ouverture du passage de Baramauleh, qu’il attribue à Vichnou. La tradition n’est curieuse que parce qu’elle donne un exemple remarquable de la disposition des mahométans à amplifier les fables des Hindous. On ne trouve pas la moindre trace de cette légende dans le Râdjâ Taringin’i.